samedi 28 septembre 2013

Dégueulasse

Des mois de silence..... Et pourtant, je n'en pense pas moins, hein, comme disait ma grand-mère, quand je vois ce que je vois, que j'entends ce que j'entends, ben je suis bien contente de penser ce que je pense. Des mois à essayer d'assumer ma fonction (car, non, mon métier n'existe toujours pas, c'est toujours un paillasson sur lequel on s'essuie les pieds.....), et je suis plutôt contente de moi. 
Car oui, aujourd'hui, j'ai décidé de faire de l'autosatisfaction primaire : oui, je suis fière de moi, oui j'ai fait un boulot formidable, oui j'ai réussi à imposer dans le calme, l'humour et la rigueur professionnelle, une certaine façon de faire.
Ooooooh, mais quelle prétention ! Quelle fatuité, voire arrogance ! Que nenni, ce procédé est juste une façon de se protéger contre l'abominable broyeuse hiérarchique qui, ces temps-ci, s'en donne à cœur joie, donnant de l'hydre Education Nationale une image de totalitarisme dans laquelle des petits chefs imbus d'eux-mêmes et fiers de leur pouvoir de nuisance, laminent et détruisent chaque tête qui oserait dépasser, tout en ignorant superbement les appels à l'aide de leurs sujets, les minables enseignants qui portent sur leurs frêles épaules, toute la responsabilité de l'échec scolaire, selon cette même hiérarchie désolante. Oui, cette phrase est longue, mais le nombre de lignes est proportionnel à l'immense colère qui est la mienne, car lorsque je parle de mon boulot formidable, je ne parle pas que de moi, mais de tous les enseignants consciencieux, de tous les directeurs surchargés de travail et à qui on demande toujours plus.
Autour de moi, collègues laminés par cette hiérarchie à la limite haineuse, qui prend des décisions arbitraires et subjectives, inhumaines et, osons le mot car il est le plus approprié, dégueulasses. 
"Qu'est-ce que c'est, dégueulasse ?" demandait Jean Seberg à Jean-Paul Belmondo au temps de sa splendeur dans "A bout de souffle".
Dégueulasse, c'est la saleté, la méchanceté, l'arbitraire, des procédés orduriers, minables, primaires. Une façon de faire uniquement dictée par une certaine forme de frustration, d'incompétence, de jalousie, d'égoïsme.... Donner du pouvoir à des minables qui eux, n'ont de comptes à rendre à personne, on a bien vu, depuis des siècles, ce que ça a donné. 
Oui, je suis formidable, mais il me suffirait d'être une fois, une seule, fort minable, le mammouth me tirerait dessus à boulets rouges, me clouerait au pilori, m'enchainerait dans une charrette tirée par des boeufs pour m'exhiber à la vindicte populaire dans les rues de mon quartier.
C'est ce qui arrive autour de moi et ailleurs, et personne n'est à l'abri.
Alors oui, on parle des violences des élèves ou des parents à l'encontre des professeurs, j'ai personnellement éteint un début de rixe hier soir dans mon établissement, du haut de mon mètre 64, en robe d'été, face à un papa alcoolisé....
Mais parle-t-on de cette violence insidieuse, morale et presque pire car tapie dans l'ombre, de notre hiérarchie dont la multiplicité des corps intermédiaires est sans aucun doute, une des raisons du désastre scolaire de notre beau pays ????
Cette année, de nombreux postes proposés au concours n'ont pas été pourvus, faute de candidats. Mais qui voudrait encore exercer un métier mal payé, pas reconnu, un métier où l'erreur est fatale, un métier que prétendent connaitre les 60 millions d'habitants, un métier où on est seul, désespérément seul lorsqu'un pépin arrive.... seul face à la hiérarchie qui se défoule, se lache, jubile, se gausse et se cache derrière des textes froids et si loin de la réalité.
Heureusement, il y a les minots, les aminches, les parents, la famille. Mais quand le mal est fait, lorsque les fauves hiérarchiques sont lachés, les dégats sont déjà immenses.
I had a dream in 2012.
Ca vire au cauchemar.
Les hyènes rodent, se lèchent les babines, devant les corps à l'agonie de ce qui reste des hussards de la République.
La réussite de tous les élèves ???? L'égalité des chances, à l'heure où on ne parle que de compétitivité, de compétences et de performance ? Vae Victis ! Tout ceci est tellement contradictoire, et les profs sont entre le marteau (la compétition) et l'enclume (l'égalité des chances). Quant aux directeurs d'école, ils sont les pare-buffles, les lanciers au premier rang des batailles, ceux que l'on envoie, pour la gloire, se faire tuer au champ du déshonneur.
Car l'Education Nationale est devenue inhumaine.
Et si on parlait d'équité, pour les élèves et les pédagogues ?
Et si on parlait de confiance, de reconnaissance, de bienveillance, d'empathie, de soutien ?
Et si on réformait vraiment l'Education Nationale, à commencer par tous ces corps intermédiaires qui décident d'actions de terrain dans leurs petits bureaux sans rien connaitre de ce même terrain, et qui eux, en cas d'erreur, sont intouchables, ne rendent de comptes à personne ou presque et touchent, de surcroit, des primes de résultat (qui, au passage, viennent d'être réévaluées....) ? Et si on évaluait réellement les compétences de ces gens-là, monsieur ? Et si on me donnait enfin un vrai statut, et si ma fonction devenait un vrai métier ?
Car je ne peux pas conclure ce billet sur une note pessimiste, le pire, c'est que j'y crois encore, aux antonymes si nombreux de ce mot qui caractérise si bien l'Education Nationale : dégueulasse....



5 commentaires:

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  2. Pas mieux à l'hôpital ... Les Don Quichottesses attaquent ...

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  3. bravo ,c'est bien dit et j'y ajoute la fatigue que je ressens

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  4. et bien, on est tous dans le même esprit. Ravi de vous relire

    Le Dirlo

    http://ledirloestdanslescalier.blogspot.fr

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  5. Commentaires d'un effroyable réalisme

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